Les coliques du nouveau-né

Jusqu’au terme de la grossesse et dans les mois qui suivent la naissance, différents organes chez l’enfant poursuivent leur maturation et leur développement.

C’est le cas de l’intestin dont la motricité, les sécrétions enzymatiques et l’activité de la barrière intestinale (flore, perméabilité, immunité …) ne deviennent totalement fonctionnelles qu’au cours de la première année, période clé de la vie.

L’immaturité du système digestif à la naissance et les premiers mois va ainsi occasionner des troubles digestifs, les plus fréquents étant les coliques. L’observation du nourrisson et l’écoute des parents permettront un diagnostic précis et une prise en charge efficace si besoin.

1. La digestion est un ensemble complexe, en pleine maturation

1) le système nerveux entérique c’est à dire digestif, influencé par l’alimentation et le microbiote, va s’installer progressivement.

2) le système nerveux autonome, en cours de maturation la première année comprend 2 branches :

—Le parasympathique qui accélère la motricité et les sécrétions enzymatiques et

Le sympathique qui, au contraire, ralentit la motricité et les sécrétions enzymatiques ;

3) la transformation des aliments pour qu’ils puissent être absorbés, nécessite un système enzymatique performant ce qui n’est pas le cas chez le nouveau-né. L’absorption au niveau des entérocytes est également en cours d’adaptation ;

4) un bon fonctionnement des coupoles diaphragmatiques entre le thorax et le ventre, un bon alignement de la colonne vertébrale, en effet, une bonne respiration abdomino-thoracique et un bon positionnement de la colonne vertébrale vont limiter coliques et ballonnements ;

Une ou deux séances d’ostéopathie permettront de l’optimiser.

C’est facile de comprendre que, compte tenu de cette immaturité, des troubles digestifs vont être fréquents :

80% des enfants souffrent de coliques pendant les 3 premiers mois.

Quelques minutes après avoir pris un biberon, bébé commence à se tortiller, il devient rouge, il semble souffrir, il serre ses petits poings, il commence à pleurer, son ventre est parfois ballonné, tendu, il a des gaz qui le soulagent momentanément.

Sont associés le plus souvent à la rougeur, une transpiration et une agitation.

Cela survient plus volontiers en fin d’après-midi ou en soirée.

Le bébé est difficilement consolable, les parents sont désorientés, inquiets ne sachant pas comment le soulager.

Une définition « officielle » a été donnée pour le diagnostic de coliques du nourrisson :

La règle des 3, plus de 3h par jour, plus de 3 fois par semaine, pendant plus de 3 semaines …

Mais on ne peut pas limiter les coliques à cette définition, il y a tellement de sortes de manifestations différentes !!!

Ces coliques sont dues, le plus souvent, à l’immaturité du système digestif du nourrisson et s’atténueront après les 3 premiers mois, patience donc.

Une consultation précoce chez un ostéopathe permettra souvent d’améliorer l’état digestif du bébé et rassurera les parents.

Il sera facile d’exclure certaines causes organiques rares dont le diagnostic doit être fait rapidement :  

  • ✔ Une invagination intestinale aiguë, l’intestin s’invagine sur lui-même sur une anse intestinale.

Rares heureusement (entre 0,4 et 1,2/1000 enfants), survenant le plus souvent avant 1 an, plus fréquemment chez les garçons, le diagnostic doit être fait rapidement.

Les signes associent chez un enfant qui allait bien jusque-là, l’apparition de fortes coliques, douloureuses, paroxystiques avec des périodes d’accalmie, associées à des pleurs, à une pâleur, à des vomissements, à un refus de s’alimenter, et rarement et tardivement à l’émission de sang par l’anus.

A l’examen on retrouve un météorisme abdominal, beaucoup de gaz, une voussure de l’abdomen.                                                                                                       L’échographie abdominale permettra le diagnostic et une prise en charge rapide.

  • ✔ Une allergie aux protéines de lait de vache (APLV)

L’allergie aux protéines de lait de vache est une allergie alimentaire qui touche surtout les nourrissons et les enfants de moins de 3 ans. Elle disparaît spontanément chez 80 % des nourrissons touchés, vers l’âge de 1 à 2 ans. C’est une réaction allergique de l’organisme lorsqu’il est exposé aux protéines contenues dans le lait de vache, qui ne sont pas faites pour lui, mais également, très souvent, à celles contenues dans les laits de chèvre, de brebis ou de jument.  Ces protéines provoquent des réactions inflammatoires au niveau de la peau et de l’intestin.

L’allergie aux protéines de lait de vache peut apparaître dès l’âge de trois semaines et jusqu’à l’âge de huit à dix mois.

L’APLV peut se traduire par :

a) des symptômes digestifs coliques, régurgitations, vomissements, constipationdiarrhée.

b) des rougeurs et des démangeaisons de la peau, les démangeaisons pouvant provoquer des lésions de grattage qui risquent de s’infecter.

c) Parfois, des symptômes neurologiques comme un malaise peuvent apparaître.

d) une irritabilité, un bébé qui n’est jamais paisible, qui semble toujours en alerte.

e) La présence de filaments sanglants dans les régurgitations chez un nouveau-né de quelques semaines qui prend une préparation pour nourrisson à base de lait de vache, fait fortement suspecter une allergie aux PLV.

Les nourrissons qui souffrent d’une allergie aux protéines de lait de vache ont un risque plus élevé de développer une autre forme d’allergie en grandissant : allergie alimentaire, rhume des foins, asthme, par exemple.

En France, ce type d’allergie touche environ un bébé sur quarante.

Dans la plupart des cas, l’allergie aux protéines du lait de vache disparaît avec l’âge. Huit enfants sur 10 en guérissent avant l’âge de deux ans et neuf sur dix avant l’âge de six ans.

Cependant, un certain nombre d’entre eux, gardent une sensibilité aux produits laitiers et ne pourront en absorber que de petites quantités sous peine de voir apparaitre des symptômes cliniques variés (fragilité orl avec angines, rhino-pharyngites, otites, sensibilité articulaire, autres allergies cutanées ou respiratoires).

L’allaitement maternel pendant les quatre à six premiers mois diminue la fréquence des allergies alimentaires chez les nourrissons.

Néanmoins, ce n’est pas toujours le cas, il arrive qu’un bébé soit allergique à des substances consommées par sa mère, passant dans le lait maternel. La mère doit les détecter (trop de produits laitiers animaux par exemple) et alors s’abstenir de consommer ce type d’aliments.

Chez les enfants dont les parents présentent un terrain allergique et qui sont nourris au biberon, le pédiatre peut conseiller l’usage de laits dits hypoallergéniques qui semblent réduire le risque de développer une allergie aux protéines du lait de vache.

2. Comment faire le diagnostique de l’APLV

  • ✔ La clinique est souvent déjà évocatrice, le bébé souffre, il se tortille, n’est jamais serein, il a des coliques douloureuses, des pleurs inconsolables, souvent un reflux gênant, des ballonnements.
  • ✔ Le test de provocation labiale consiste à déposer une goutte de la substance suspecte (dans ce cas, du lait de vache) sur un côté de la lèvre inférieure de l’enfant. Après quelques heures, on recherche la présence de signes d’inflammation là où la goutte a été déposée. Un test de provocation orale (au cours duquel on fait ingérer des doses croissantes de la substance suspecte) peut également être pratiqué en milieu hospitalier.
  • ✔ Le prick-test consiste à déposer un peu de substance suspecte sur la peau (à l’aide d’une aiguille courte). Si le nourrisson y est allergique, une inflammation apparaît au point d’injection.
  • ✔ Une prise de sang peut être prescrite pour rechercher la présence d’anticorps dirigés contre les protéines de lait de vache.

3. Que faire ?

Si l’enfant allergique est allaité par sa maman, le médecin proposera à la mère de suivre un régime sans protéines de lait de vache pendant quelques semaines ou mois. Lorsque les symptômes d’allergie disparaissent, il est alors possible pour la mère de tenter de réintroduire de petites quantités de lait de vache ou dérivés et de trouver la dose maximale de protéines de lait de vache qui sera tolérée par le nourrisson.

Si l’enfant n’est pas allaité par sa mère, le médecin prescrit des laits appelés hydrolysats poussés de protéines de lait de vache ou de protéines de riz. En cas d’échec, des préparations à base d’acides aminés sont essayées, il n’y a plus de protéines seulement des acides aminés, c’est parfois nécessaire dans les cas graves. Une tentative de réintroduction est souvent faite vers 10 ou 12 mois;  ainsi 80% des nourrissons ne sont plus allergiques à 2 ans, 90% à 6 ans.

** Une intolérance au lactose

La véritable intolérance au lactose, considérée comme héréditaire, est exceptionnelle chez le bébé.

Mais on retrouve souvent chez les parents de bébés présentant des signes d’intolérance au lactose, des difficultés à digérer le lactose quand on leur pose la question.

L’intolérance au lactose est due à une insuffisance de production d’une enzyme, la lactase par l’organisme; Le lactose, principal sucre du lait est décomposé par la lactase qui est produite par la muqueuse de l’intestin grêle; Cet enzyme digère le lactose ingéré pendant les repas en coupant la molécule de lactose en deux molécules simples, le glucose et le galactose; Le glucose et le galactose sont ensuite absorbés à travers la muqueuse de l’intestin et peuvent rejoindre la circulation sanguine.

On parle d’intolérance au lactose lorsque cette enzyme est produite en trop faible quantité, chez le nouveau-né, les cellules intestinales étant immatures. Certains bébés vont donc avoir des difficultés à digérer des doses importantes de lactose parce que leur sécrétion de lactase n’est pas suffisante. Cela se voit avec des laits infantiles dont la fraction glucidique est exclusivement (100 %) ou très majoritairement composée de lactose.

Les bébés allaités par leur mère, ont moins de coliques liées à une insuffisance en lactase ; En effet le lait maternel contient, comme tous les laits d’origine animale du lactose, mais il contient également de la lactase qui aide ainsi le nourrisson à digérer.

4. Quels sont les symptômes de l’intolérance au lactose chez l’enfant ?

Si votre bébé est intolérant au lactose, il peut présenter les symptômes suivants

  • Des ballonnements (ventre tendu, gonflé…)
  • Des douleurs abdominales et des gaz, il se tortille, pleure, s’énerve, pousse pour avoir des selles et n’émet souvent que des gaz ;
  • Une diarrhée acide et mousseuse
  • Un érythème fessier (dû à l’acidité des selles)

Ces manifestations débutent assez rapidement après la prise du biberon, leur durée varie en fonction de la quantité de lactose absorbée par le tout-petit et de sa capacité à le digérer ;

La fraction non digérée de lactose est fermentée par le microbiote et provoque des flatulences ;

Ces manifestations chez le nourrisson, liées à une production insuffisante car la muqueuse est immature, rejoignent les manifestations que l’on retrouve chez les enfants plus grands et chez les adultes, cette fois liées à une baisse progressive et normale de la production de lactase; Cette baisse de la production de lactase est très inégale au sein de la population mondiale, les pays du nord de l’Europe maintiennent le plus souvent une synthèse de lactase assez élevée au cours de leur vie, contrairement aux pays du sud. En Suède vous trouvez les bouteilles de lait sur la table aux repas de midi et du soir ….

L’intolérance au lactose peut également être secondaire à une maladie cœliaque ou une gastro-entérite, la destruction des villosités intestinales entraînant secondairement la diminution de la sécrétion de lactase; Ce type d’intolérance est temporaire en cas de gastro-entérite, mais peut durer parfois plusieurs semaines et ne s’estomper qu’une fois la muqueuse intestinale guérie.

5. Que faire en cas d’intolérance au lactose chez le nourrisson ?

Si c’est le rare cas d’intolérance héréditaire, il faut donner au bébé un lait sans lactose.

Sinon en cas de maldigestion du lactose chez un bébé qui boit une préparation pour nourrissons, on choisira un lait avec moins de lactose et plus de dextrine maltose.

Si le bébé est allaité par sa mère, et qu’il présente des signes d’intolérance au lactose on demandera à la maman de limiter sa consommation personnelle de produits laitiers sur 2/3 semaines et en fonction de l’amélioration ou pas, elle pourra reprendre ou non, de façon raisonnable, ces aliments.

  •             – les coliques et les régurgitations sont fréquemment intriquées.  Ça n’est pas toujours facile de faire la part des symptômes liés aux coliques et ceux liés au reflux gastro-œsophagien, il faudra interroger précisément la maman pour comprendre ce qui se passe et bien observer le nourrisson ; Les ballonnements liés aux coliques accentuent souvent les symptômes du reflux gastro-œsophagien, les reflux gênants et souvent douloureux, provoquent une tension chez le bébé qui pleure, s’énerve et son tube digestif dans son entier hyper réagit.
  •          – enfin, rarement, une infection peut être à l’origine de coliques, infection urinaire par exemple, des troubles digestifs pouvant être le premier symptôme.

6. Comment répondre aux coliques de bébés (ou les résoudre)

  • ✔ Les probiotiques : que l’enfant soit allaité, mais né par césarienne, ou nourri avec les PPN (préparations pour nourrissons), sa flore intestinale aura un peu plus de difficultés à démarrer…                                                                        Lui donner un probiotique chaque jour pendant 2 mois sera bénéfique et va rapidement l’aider à digérer plus facilement le lait ;
  • ✔ La tétée ou la prise du biberon se fera dans le calme, lumières tamisées, les tétées seront espacées si possible d’au moins 1h30 à 2h au début, les biberons d’au moins 2h à 2h30.
  • ✔ Porter bébé dans une écharpe ou un porte bébé, le bercer, lui parler doucement, lui chanter une berceuse, tout cela va le rassurer, et bien sûr, rester auprès de lui quand il pleure est indispensable,
  • ✔ Les bébés ont besoin de contact, ils adorent les massages, les câlins, qui vont les soulager, certaines positions en particulier, dans les bras, positionné sur le ventre, une main du parent maintenant son ventre,
  • ✔ Une consultation chez un ostéopathe habitué aux bébés devrait être systématique après la naissance et en cas de troubles digestifs, coliques ou régurgitations elle me semble incontournable.
  • ✔La fatigue de la mère : la grossesse, l’accouchement sont des moments de bonheur pour la plupart des femmes mais sont aussi des périodes épuisantes ;

Les semaines suivant la naissance, les mamans ont besoin d’être soutenues, aidées ; Leur entourage doit être vigilant et très présent pour prévenir tout état dépressif qui aurait un retentissement sur le comportement du bébé.

La maman fera le maximum pour avoir une alimentation équilibrée, 4 repas par jour, légumes et féculents à part égale, protéines 2 fois par jour, légumineuses, fruits frais, cuits, fruits secs, évitant les aliments qui peuvent occasionner des gaz, des ballonnements : Choux , haricots, oignons, épices, boissons gazeuses,

Dans certains cas, le lait et les laitages d’origine animale, absorbés par la mère peuvent induire coliques et reflux chez le bébé, il sera alors judicieux de faire l’essai de les diminuer voire de les supprimer dans l’alimentation de la mère ;

  • ✔ Les changements de lait sont possibles et parfois bénéfiques, mais il est préférable de le faire en accord avec le médecin :
  •  —–on peut essayer un lait sans lactose
  • —–un lait avec peu de caséine et plus de protéines solubles favorisant la digestibilité
  • —-si ça ne suffît pas à améliorer la situation, on peut essayer un lait à base de lait de chèvre, mais il y a aussi du lactose dans ce lait comme dans le lait de vache, si le bébé est intolérant au lactose cela ne l’aidera pas ;
  • Par contre si le problème est une intolérance ou allergie aux protéines du lait de vache, passer à un lait de chèvre qui a des molécules de caséine plus petites, plus digestes, peut régler le problème.  Mais pas toujours, il y a en effet des enfants qui ne supportent aucun lait animal.
  • —–donc, si les douleurs et les coliques restent difficiles à supporter il est possible de passer à une PPN à base de protéines végétales spécial bébé, protéines de riz le plus souvent ;
  • ✔ Enfin, une consultation chez un homéopathe sera d’un apport intéressant, divers remèdes peuvent améliorer l’état digestif de l’enfant :

• cuprum metal 5ch (3 gr x 2 fois par jour)

• colocynthis 5ch (3 gr x 2 fois par jour)

• nux vomica 5ch (3 gr x 2 fois par jour)

• Carbo vegetabilis 5ch (3 gr x 2 fois par jour)

• Lycopodium 5ch (3 gr 1 fois par jour)

• Magnésia carb 5ch (3 gr 2 fois par jour)

Etc…

Ils seront choisis selon le terrain et les symptômes associés.

Conclusion

Les coliques, si fréquentes, souvent inquiétantes à tort pour les parents sont liées le plus souvent à l’immaturité du système digestif, elles ne durent heureusement que quelques semaines ; Passés les 3 mois du bébé, elles s’atténuent puis disparaissent complètement.

La famille retrouve alors le calme et le bonheur de pouponner.

Soyez patient 

–  la maman qui allaite doit faire attention à son alimentation ;

–  le Bébé a besoin d’une maman paisible (il perçoit son anxiété) ;

–  l’entourage de la maman et du BB doivent être attentifs à leurs besoins respectifs.

Dr Catherine Laurençon

<[email protected]>

Pédiatre Homéopathe

* texte contrôlé et validé par le Pr Henri Joyeux