Lettre N°5 de Christine Bouguet-Joyeux – Le 16 novembre 2017

Chers amis,

Parmi toutes les questions que nous recevons, beaucoup tournent autour de la nutrition des bébés. Les transmissions et le soutien familial certes se font plus rares, mais surtout il y a tant de propositions plus interpellantes les unes que les autres, et il y a aussi tant de trouble dans les informations, que vous êtes inquiets, inquiètes surtout, pour la santé de vos bébés. Vous posez beaucoup de questions, du fait des allergies et intolérances, sur la place des laits végétaux par rapport aux laits en général. Un point global nous est donc apparu nécessaire !

Merci pour vos questions qui nous ont suggéré ce thème, autour de l’allaitement et la nutrition des bébés, sur Familles Santé Prévention.

Pour une information complète et digeste, j’ai préféré diviser mon propos en 4 parties qui seront publiées successivement tous les 15 jours.

  • 1- L’idéal le lait maternel
  • 2- Les laits animaux : vache, chèvre, brebis, jument, ânesse, bufflonne, chamelle…

  • 3- Les laits artificiels Industriels
  • 4- Les laits végétaux : amandes, noisettes, châtaignes, noix, riz, quinoa, soja

1- L’idéal le lait maternel

De plus en plus de jeunes femmes ont compris l’importance de l’allaitement maternel comme le recommande l’OMS, 6 mois intégralement et au moins une année matin et soir, avant de partir au travail et au retour.

En France selon les dernières études_, le pourcentage des femmes qui allaitent leur enfant est de 70% à la naissance, mais ensuite il n’est plus que « prédominant », il en reste 50% des 70% à 17 semaines, et seulement 19% des bébés reçoivent encore du lait maternel à 6 mois. A un an, il en reste 5,3% : à ce propos l’INVS (Institut National de Veille Sanitaire) fait le même constat : « Malgré son allongement depuis les années 1990, la durée de l’allaitement en France reste très éloignée des recommandations du PNNS et encore plus de celles de l’OMS. »[1]_

La composition Idéale

La composition du lait maternel a beau être copiée par les fabricants de laits artificiels, rien ne vaut le lait de sa maman pour l’enfant. Il constitue sa première et durable protection immunologique, donc son meilleur vaccin et la meilleure nutrition pour sa croissance. Les anticorps maternel, des molécules (immunoglobulines) et des cellules protectrices telles les lymphocytes T4, ne sont présents que dans le lait maternel. (voir sur le site du Pr Henri Joyeux, les lettres 97 « Vos seins prennent la parole », 123 « Le lait maternel, le meilleur des vaccins », et 124 « Douze réponses sur l’allaitement maternel et les vaccins ») et son livre « Manger Mieux et Meilleur de 0 à 100 ans » .

Le lait maternel apporte au nourrisson les facteurs de croissance neurotrophiques indispensables à son développement anatomique et fonctionnel cérébral et donc neurologique. Il contient glucides spécifiques et acides gras polyinsaturés, et en particulier il apporte naturellement au bébé des acides gras oméga 3, utiles au développement des cellules du cerveau, de la moelle épinière et du système nerveux périphérique. Et bien entendu il reflète l’alimentation de la maman, qui doit être particulièrement attentive à la qualité de ce qu’elle mange, et en particulier fruits et légumes frais bio, de proximité et de saison, salades, volailles et œufs bio (à la coque), poisson et fruits de mer cuits à la vapeur douce, huile d’olive de qualité et de noix…

Selon le Dr Michel Massol, professeur à l’Université de Toulouse-III (Revue Aesculape, n° 10, jan-févr. 1998) « Le lait de femme contient 2 à 3 fois moins de protéines, mais dans la répartition des aminoacides, il est plus riche en cystéine, plus pauvre en tyro- sine, phénylalanine et tryptophane ; il ne contient pas de b-lactoglobuline mais renferme trois fois plus d’immunoglobulines. »

Pour l’immunité de l’enfant, le lait maternel apporte donc des anticorps maternels (IgAs), des micronutriments essentiels, et des cellules protectrices telles les lymphocytes T4[2]. Pour son cerveau et son système nerveux, il apporte au nourrisson les facteurs de croissance neurotrophiques indispensables à leur développement, qui évolue énormément dans les premiers mois de vie.

Au niveau des lipides le lait humain contient trois fois plus en moyenne d’acides gras poly-insaturés à longue chaîne (AGPILC), dont les acides linoléiques (18 : 2, n° 6), a-linoléique (18 : 3, n° 3) et cervonique (22 : 6, n° 3) particulièrement importants pour le développement harmonieux du Système Nerveux Central et de la rétine de l’enfant qui voit de mieux en mieux.

Le lait de femme renferme 1,5 fois plus de glucides, dont de lactose et des oligo-sac- charides, deux fois plus environ de Vitamines E, C, B3, mais par contre beaucoup moins de Calcium, de Potassium, de Vit B1, B2 et B6. L’intolérance au lactose du lait de vache oblige à s’interroger sur la digestibilité du lait de vache comme nous le verrons.

Qui plus est, c’est le seul lait qui ne subisse aucune transformation donc dégradation de ses composants avant d’être bu et absorbé par le nourrisson. Il est à la température idéale et en quantité suffisante au moins tant que l’enfant n’a pas ses premières dents, et même pendant une année. Il s’adapte aux besoins du bébé dans le temps, matin plus riche et soir plus léger donc plus digestible pour mieux dormir, et en fonction de son âge. En cas de baisse de l’allaitement, il suffit d’augmenter le nombre de tétées et le débit lacté augmente.

En plus de son intérêt pour la santé du nourrisson – protection contre les infections infantiles et les malabsorptions, augmentation du Quotient Intellectuel calculé plus tard à 5 ans, moins de diabète et de surpoids – , l’allaitement maternel est favorable à la santé de la mère, tant physique au niveau mammaire (un des facteurs de protection contre le cancer du sein), qu’au niveau psychologique dans sa relation avec son enfant[3].

Les arguments utilisés par les lobbies des laits artificiels ne tiennent plus

L’inesthétique mammaire est un faux argument car l’allaitement maternel est le meilleur moyen de développer des seins de trop petits volumes et aussi les risques de pollutions du lait par les pollutions reçues sans le vouloir par la mère sont les arguments principaux pour détourner les jeunes mères de l’allaitement, sans leur dire que cela dépend de leur alimentation et environnement (dont le tabac). On fait croire aussi aux jeunes mères que c’est plus facile de faire des biberons. Les vaches (et leur lait) ne seraient donc pas polluées ni traitées???

Y a-t-il des difficultés de transport ou de préparation pour allaiter ? Evidemment non ! Quant aux techniques de stérilisation et transformation des laits animaux, elles sont facteur de dégradation et glycation (certaines protéines se transforment en sucre), donc de toxines génératrices de diabète, mais aussi d’inflammation et de stress oxydant[4]. A ces éléments plus ou moins toxiques échappe totalement le lait maternel, dont la composition et la quantité varient en fonction des besoins du bébé et entre le matin et le soir (plus léger pour faciliter son sommeil).

Nous devons aussi avertir les jeunes mamans de se méfier des traitements proposés après l’accouchement : exemple les pseudo « Vitamines » qu’on leur proposait il n’y a pas si longtemps, soi-disant nécessaires du fait de la grande fatigue de l’accouchement. Il s’agissait en réalité d’un médicament désormais interdit post accouchement, qui n’est autre que le « Parlodel ou Bromocriptine » qui a une forte action anti-hormonale. Celle-ci interrompt la lactation par son effet « anti-prolactine », responsable de troubles neurologiques et même cardiaques. Cela explique le grand nombre de mères, désormais d’un certain âge, qui vous disent qu’elles n’ont pas pu allaiter car « elles n’avaient pas de lait. »

La reprise du travail est un vrai stress chez les jeunes mères

L’allaitement maternel est souvent présenté comme une contrainte et une limitation, ce qui n’est pas faux, mais il libère d’autres contraintes comme les biberons, les lavages et stérilisations, les laits artificiels plus ou moins chers (60 à 90€ par mois) et contraignants à acheter – ou changer s’ils ne conviennent pas à Bébé… Qui leur a dit qu’elles pouvaient conserver une tétée le matin et une autre le soir pour assurer l’essentiel des besoins immunitaires et nutritionnels du Bébé ? Qui a osé aussi rappeler ce qui est connu des plus humbles tribus – qu’un allaitement pouvait redémarrer, ou démarrer à partir de zéro, seulement en mettant le bébé au sein ? Qu’en cas d’abcès sur un sein, l’autre peut continuer à allaiter pendant que l’on soigne le premier, et s’il faut complètement stopper l’allaitement le temps de la guérison rien n’empêche de le relancer une fois guéri… Je ne connais qu’un organisme qui le dise, c’est la Leche League, qui fait un travail excellent auprès des nouvelles mères, de formation et d’accompagnement, pas assez reconnu et trop peu diffusé. Les mères qui ont fait le choix d’allaiter devraient pouvoir reprendre leur travail seulement après les 6 mois de leur allaitement intégral. Voilà une demande sociale que les mères finiront par obtenir lorsqu’en particulier en France la féminisation des responsables politiques sera plus large, au moins à parité avec les hommes.

En réalité c’est la reprise du travail trop tôt qui fait que peu de femmes allaitent jusqu’à 6 mois intégralement leur enfant. Elles peuvent cependant garder deux tétées par jour, une le matin, l’autre le soir, même quelques lampées suffisent, pour soutenir le développement et l’immunité de l’enfant. C’est donc l’idéal pour la santé de leur bébé. Cela permet d’aller sans risques directement vers les laits végétaux si nécessaire dès 5-6 mois. Les jeunes mères peuvent alors commencer la diversification à partir de 6 mois, et assurent – par les deux tétées – les défenses immunitaires jusqu’à 18-24 mois : celles-ci demandent 1000 jours à partir de la conception (270 jours de grossesse + 2 années de 365 jours) pour être totalement matures.

Le souci des jeunes mères est d’éviter à leur bébé les intolérances

Normalement un bébé nourri au sein, et dont la mère a une alimentation fraîche, naturelle, bio de proximité, et de qualité (de type méditerranéen) ne doit pas présenter de réactions allergiques ou d’intolérances. L’allaitement maternel au contraire est protecteur contre la prématurité du nourrisson, ses allergies, les risques de diabète ou de surpoids. Cependant les intolérances peuvent être, à l’origine, présentes chez la mère qui allaite, et plus ou moins connues dans la famille. Les intolérances du bébé sont secondaires à celles de la mère, repérables en général déjà à travers l’allaitement.

Quels signes ? Lorsque le bébé allaité régurgite, pleure souvent, a les fesses irritées et des selles malodorantes… ou par d’autres manifestations cutanées, croûtes de lait, eczéma, ou respiratoires, rhinites, toux… La mère doit alors se poser des questions sur sa propre alimentation : est-elle suffisamment végétale ? Consomme-t-elle des fruits, légumes et légumineuses de qualité ? Si elle a consommé des aliments qu’elle digère mal, tels des viandes grasses, les produits laitiers animaux ou céréaliers industriels (pain, pâtes, pizzas, biscuits…), si elle a bu autant sodas que trop de vin, fumé tabac ou joints, son bébé le lui dit clairement par ses intolérances et sa santé qui va se détériorer.

A six mois, les premières dents sont déjà là : c’est signe que la diversification alimentaire peut commencer, progressivement ! L’enfant va pouvoir croquer la pomme, la poire ou la mandarine bio..

L’idéal est donc, après un allaitement maternel complet de 6 mois, et à partir de la diversification alimentaire, de recommander des laits végétaux sauf le soja qui contient comme nous le verrons trop de phytohormones, ou les céréales telles avoine et riz, insuffisants en micronutriments et en calcium, et trop glucidiques. En effet, 6 mois et dès les premières dents, tel est l’âge où peut commencer la diversification alimentaire du bébé. Les apports alimentaires doivent alors varier et se compléter. Ils doivent être de qualité (fraîcheur, bio, cuisson domestique courte de préférence à la vapeur douce), enrichis en acides gras de qualité (huile d’olive, associée à un peu d’huile de noix ou colza, bios et première pression à froid), en introduisant progressivement des protéines animales de bonne provenance (jaune d’œuf, poisson blanc ou volaille cuits à la vapeur douce) et assurer une nutrition équilibrée et naturelle. Ainsi peut-on éviter d’exposer prématurément l’enfant à des produits susceptibles de déclencher des allergies et/ou intolérances, car donnés trop tôt et trop dénaturés par les transformations industrielles ; mais par contre il pourra découvrir plus tard (2 ans) et à très petites doses des fromages naturels et affinés plus intéressants pour sa santé, en apprenant à les mastiquer longuement (rôle de la salive).

A bientôt pour les parties suivantes !

Bien cordialement,

Christine Bouguet-Joyeux – Nutritionniste

[1] https://www.lllfrance.org/vous-informer/actualites/1722-que-disent-les-taux-dallaitement-francais

[2] Cf. les lettres 97 (« Vos seins prennent la parole »), 123 (« Le lait maternel, le meilleur des vaccins »), et 124 (« Douze réponses sur l’allaitement maternel et les vaccins ») sur le site www.professeur-joyeux.com

[3] « L’augmentation de l’allaitement jusqu’à un niveau universel pourrait prévenir 823 000 décès par an chez les enfants de moins de 5 ans, et 20 000 décès par an de cancers du sein. », The Lancet Février 2016

[4] The Mount Sinai Hospital / Mount Sinai School fo Medicine, « Baby formula : inflammatory food toxins found in high levels in infants », Science Daily, 6 octobre 2011

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